Artiste subversif et très controversé, la peinture de Van Gogh fait encore aujourd’hui débat. Au nom de l’impressionnisme, ce peintre dramatique se permet de porter un jugement immoral sur le mercantilisme de la société du XIXe siècle. Avec une oeuvre posthume, qui mêle l’incohérence de l’animalité humaine au formalisme coloré des paysages montagnards, son flux artistique n’a de particulier que sa vision à reconsidérer la nature profonde de la peinture. Ce contraste culturel, très présent sur l’ensemble de ses tableaux, offre ainsi la possibilité aux spectateurs d’entrevoir une interprétation libre et personnelle, sur l’état de conflit permanent et de tension calligraphique dans sa recherche artistique. Aujourdui encore, ce succès posthume continue de fasciner et de déchaîner les passions, entre mythe et réalité de l’homme !
Café de nuit, intérieur – Arles, 1888 – huile sur toile, 81 x 61,5 cm – New Heaven, Yale University Art Gallery
Ce tableau abstrait, retrace avec nostalgie la sulfureuse existence menée en par Van Gogh en France, en compagnie de ses amis Gauguin et Aurier. Dans l’éponyme café de l’Alcazar à Arles, l’artiste se remémore avec envie, les courts instants de bonheur passés dans ce cossu local méditerranéen. La teinte de couleur jaune monopolise l’attention. Cette attention toute particulière de l’auteur, est une référence non dissimulée à sa maison secondaire des Hautes-Pyrénées. La construction soignée de l’oeuvre, offre une perspective circulaire multicolore. Dans cette dernière, ce forme un halo tri-dimentionnel qui pousse les couleurs chaudes rouges et oranges, à mettre en relief les silhouettes froides des personnages, teintées de bleu et de vert. Le jeu des lumières est omniprésent, puisque avec des lignes de perspectives partant du sol, Van Gogh éclaire non seulement le regard du public vers le lieu désigné mais relève aussi le tracé subtil de l’instrument perspectif, sur la luminosité des lampes du plafond. En outre, la complémentarité des jeux de lignes de fond, relève la sensibilité artistique du peintre sur l’importance du milieu par rapport aux personnes.
Vase avec des tournesols – Arles, 1889 – huile sur toile, 95 x 73 cm – Amsterdam, Musée Van Gogh
Dans sa paisible demeure arlésienne, Van Gogh decide de redécorer son intérieur. Il réalise pour l’occasion, sept natures mortes aux couleurs du midi. Le modèle présenté est la quatrième toile, peinte avec quinze tournesols. Ce tableau monochromatique offre du volume à cette composition florale toute peinte en jaune. La diversité dans le graphisme des fleurs, permet à chaque détails de la plante de demeurer unique pour mieux insister sur le caractère personnel de l’ouvrage. L’harmonie de la toile trouve son origine dans les teintes vertes et bleues qui relève le mouvement des pétales sur l’inactivité du vase. La cohésion graphique du tableau joue aussi sur le parallèle, entre un fond monochromatique cohérent et un mouvement ininterrompu de la plante. Par ailleurs, l’influence de l’estampe japonaise sur cette toile favorise l’expression de la sensibilité artistique du peintre, sur l’évolution dans le temps de cette composition florale, à la fois pleine de douceur et d’agressivité.
La Nuit étoilée – Saint-Remy-de-Provence, 1889 – huile sur toile, 73 x 92 cm – New-York, Museum of Modern Art
Durant ces années d’incarcération à l’asile psychiatrique de Saint-Paul-de-Mausole, Van Gogh écoule une vie morose et pleine d’angoisses. En proie à des visions apocalyptiques, ses moments de démence côtoient la perversité à l’innocence. Dans un instant de rare lucidité, il fait jouer sa foi religieuse à travers une représentation transfigurée d’un ciel nocturne. La libre interprétation du peintre, dans cette incarnation abstraite et infinie de la nature, offre ainsi la possibilité d’une réflexion sur la puissance de l’imagination humaine. Cette Nuit étoilée joue sur le mélange des teintes foncées et claires comme pour faire transparaître, la vivacité des formes fantaisistes des cyprès. Toute cette atmosphère symbolique, renvoie à un déchirement sentimental, moral et religieux qui pour Van Gogh, doit incarner une névrose artistique. Pour justement aboutir, à l’éclosion de la sensibilité du naturalisme humain.
Les mangeurs de pommes de terre – Nuenen, 1885 – huile sur toile, 82 x 111 cm – Amsterdam, Musée Van Gogh
Dans un graphisme assez simpliste et osé pour l’époque, Vincent Van Gogh dépeint avec amertume, la drame de la condition humaine dans la société du XIXe siècle. La violence et le rachitisme de la silhouette des personnages, rendent pathétique le déroulé de la scène. Leurs airs attristés et miséreux offrent un spectacle peu gratifiant pour la Révolution Industrielle. Dans ce contraste d’ombre et de lumière, l’opposition calligraphique entre les teintes ocres et beiges, perturbent le regard du spectateur qui est profondément marqué d’un sentiment d’injustice. Les contours disgracieux des principaux acteurs de la scène, auxquels s’ajoutent les faiblesses de leurs mouvements et l’impuissance dans leurs expressions faciales, renforcent la culpabilité de la morale du peintre sur l’éthique artistique. Le dessin obscur, relève du mystique comme pour mettre en deux-temps, la violence d’une société particulièrement primitive.
Le pont de Langlois – Arles, 1888 – huile sur toile, 49,5 x 64 cm – Cologne, Wallraf-Richartz Museum
Tableau typique de ses années dans le Sud, Van Gogh représente avec une vivacité et une aisance technique forte, la banalité de son monde contemporain. Avec un amour non dissimulé pour les paysages du Languedoc, les traits fins à la couleur blanche auquel s’ajoute le fond brun, rendent limpide un paysage pourtant hostile. Les différents points de reliefs facilitent un visionnage progressif sur la toile, des embarcations fluviales, au groupe de jeunes femmes en passant pas les structures du pont de pierre. Par ailleurs, ce pont typique du Japon médiéval, est un hommage de Van Gogh au « Pays du Soleil Levant », repérable ici par sa structure caractéristique de la peinture extrême-orientale. De plus, la synthèse des couleurs claires, saisie avec une netteté calligraphique rare, l’évolution lumineuse de cet havre de paix, si cher à Van Gogh.
Portrait du Docteur Gachet – Auvers/Oise, 1890 – huile sur toile, 68 x 57 cm – Paris, Musée d’Orsay
Dans une construction pyramidale, ce portrait en relief, représente avec humilité, l’amitié de Van Gogh pour Gachet. L’expression du visage, est particulièrement forte et fugace. Le bleu des vêtements se fond dans le décor rosâtre du mobilier. Le visage calme et reposé, le docteur Gachet représente l’oisiveté de la société bourgeoise, sous l’ère Industrielle. Le caractère humain de ce personnage, dresse un portrait remarquable du fondement des perspectives, qui invite les spectateurs à participer au débat. La revalorisation décorative de l’atmosphère chaleureuse de cette scénette, permet au peintre de mieux se réapproprier la confiance mise dans cette amitié. Les influences impressionnistes et réalistes, décèlent ainsi la gratitude du peintre et nous montre ainsi l’évolution de son style, tout au long de sa carrière.