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Les rencontres de l'Histoire

Interview avec Jérôme Prieur

Grand documentariste passionné par l’Histoire de la Seconde Guerre Mondiale, Jérôme Prieur nous livre dans cette interview, un regard plus attentif et éclairé sur les Jeux olympiques de 1936. A l’occasion de la sortie de son film, Les Jeux d’Hitler, le cinéaste nous invite à comprendre la complexité de la société européenne, de la fin des Année 30, tiraillée entre le fascisme et l’agonie de ses libertés fondamentales.    

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Portrait de Jérôme Prieur par Kai Juenemann (© k-j.com)    

Pouvez-vous nous raconter, la démarche avec laquelle vous avez réalisé ce film ? 

Il y a une certaine difficulté, à ne pas être anachronique dans un film d’Histoire. Pour le réaliser, il faut faire avec ce contexte de terreur, sans la montrer. Dans un sens, il faut regarder le passé, avec l’encadrement de l’information. De plus, les images amateurs ont une valeur sociologique, puisque grâce à elles, le contexte a pu se dévoiler.  Le rôle de ce film est donc de recréer la sensation du temps à l’Histoire. C’est un vrai travail de rassemblage, pour éviter les contradictions, avec notamment l’analyse des images de propagande de l’époque, pour déc. 

Quelles ont été vos motivations pour produire ce documentaire ? 

Je voulais mettre en oeuvre ce grand récit polyphonique en nous immergent dans cette époque. Montrer cette invraisemblable vie quotidienne des allemands, sous le régime Nazi. Il fallait donc revaloriser le patrimoine, des images amateurs de l’époque, afin de toujours montrer que les racines de cette histoire, ne sont pas coupées.

« Ces jeux ont eu sur les démocraties, un pouvoir de séduction par rapport à Hitler »

Pensez-vous que le sport et la politique, sont indissociables dans le contrôle de l’Allemagne par les nazis ? 

Il s’agit ici d’un véritable rapport étatique, du nazisme au peuple, dans une volonté d’unité générale. L’on perçoit la grandeur de ce pays, par l’amateurisme visuel des films de l’époque. Berlin était alors la vitrine du national-socialisme, dans le monde entier. Le film du Film de Riefenstahl, le rend toujours plus percutant au delà du temps. Ces jeux ont eu sur les démocraties, un pouvoir de séduction par rapport à Hitler. 

Pensez-vous que la communauté internationale a échoué dans la prévention et la gestion du cas allemand à l’organisation de ces jeux ?

Il est clair les Etats se sont reposés lâchement sur la fiction de l’indépendance du CIO pour abandonner leurs responsabilités politiques et finalement faire le jeu de l’Allemagne nazie. Il est significatif de constater que les manifestations en vue du boycottage des Jeux qui ont été nombreuses à se produire à travers le monde entier n’ont abouti à rien.

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Jérôme Prieur répond à des questions de spectateurs lors de la projection de son film, à l’Assemblée Générale des Amis du Musée de la Résistance, en octobre dernier (©M&H)

Votre opinion sur la participation et la prestation des athlètes français aux JO de 1936 ?

La participation même aux JO de 36 a beaucoup divisé les milieux sportifs français, y compris la presse et les hommes politiques. Il n’y a qu’à voir les revirements du grand journal sportif « L’auto » qui a fini par comprendre, trop tard, ques les Jeux de Berlin était une mascarade sportive. Surtout l’organisation des Jeux a eu lieu dans une période
de politique intérieure française très agitée, qui s’est conclue par l’arrivée au pouvoir du Front populaire. La France a voulu miser sur les deux tableaux, les Jeux de Barcelone (qui n’eurent pas lieu) et les Jeux de Berlin, pour ne pas mécontenter Hitler et garder l’espoir d’une entente pacifique avec l’Allemagne. Jean Longuet et Pierre Mendès-France ont été parmi les rarissimes députés français à s’opposer clairement aux Jeux de Berlin.
Mais ne faut jamais oublier qu’en 1936 la Grande guerre s’est terminée 18 ans plus tôt seulement, et que le sentiment général est plus jamais ça.
Tandis que l’Allemagne nationale socialiste entrainait ses athlètes comme une armée, les français faisaient confiance aux vertus de l’amateurisme chères au fondateur du renouveau des Jeux, Pierre de Coubertin. Le résultat a été accablant.

Quel bilan tirez-vous de ces Jeux de Berlin ?

Hitler en a été le grand vainqueur, et l’Allemagne en en est sortie galvanisée par les médailles de ses sportifs qui l’ont porté leur pays au premier rang des nations. Le grand spectacle sportif a été une opération de propagande extraordinaire au benéfice de l’Allemagne nationale-socialiste. 

Si vous deviez choisir un sportif marquant lors de ces jeux, lequel serai-ce ?

D’évidence Jesse Owens avec ses quatre médailles d’or. Mais on oublie très souvent l’ostracisme dont il a été victime dans son pays même, les Etats unis, du fait de la couleur de sa peau. Malgré un retour triomphal à New York, le président Roosevelt ne l’a jamais reçu…

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