Loading...
Les merveilles du monde

Astérix, icône populaire de l’histoire de France

Astérix Ⓒ Éditions Albert/René / Page Facebook Astérix et Obélix

Guerrier gaulois le plus connu de la bande-dessinée franco-belge, Astérix fête cette année son soixantième anniversaire. Alors que ce soir, M6 diffuse le film d’animation, le Domaine des Dieux d’Alexandre Astier et Louis Clichy, pour rendre hommage à la disparition d’Albert Uderzo, la rédaction de Mémoire & Histoire vous propose un portrait inédit de l’irréductible gaulois. Sus aux Romains ! 

Un casque ailé, une crinière blonde, un caractère de gouailleur, Astérix est là. La chansonnette de Plastic Bertrand trotte dans toutes les têtes des soldats romains. Un demi-siècle est passé depuis sa première aventure en 1959. Mais, Astérix et son village d’irréductibles continuent de prendre un malin plaisir à cogner sur les légions de César. 38 albums au compteur, des films et des jeux vidéo à son nom et même un parc d’attractions, à 60 ans, le petit gaulois n’a pas pris une ride. Ce personnage râleur et brave suscite toujours l’admiration du public.

Naissance du héros gaulois, Astérix

Astérix se dévoile au grand public dans les colonnes de Pilote, célèbre périodique de bande dessinée dans les années 60. Son apparition est le fruit d’une discussion agitée entre deux génies du 9e Art, René Goscinny (Lucky Luke, le petit Nicolas) et Albert Uderzo (Les aventures de Tanguy et Laverdure). « Les deux auteurs ont construit des héros à leur image. C’est ce qui fait le charme de l’œuvre », précise Éric Teyssier, maître de conférences en histoire à l’université de Nîmes. Tous les deux passionnés par l’histoire de France, c’est tout naturellement que les deux compères vont puiser dans la culture gallo-romaine pour inventer leur récit. « L’un voulait un guerrier puissant et fort. L’autre désirait un Gaulois chétif et espiègle. Ils ont réussi à se réapproprier l’imagerie du Gaulois, tel qu’il était représenté dans la première moitié du XXe siècle », détaille l’historien.

Albert Uderzo et René Goscinny (à droite), pour la sortie du film Astérix le Gaulois, en 1967. FONDS D’ARCHIVES INSTITUT RENÉ GOSCINNY/DR
Albert Uderzo et René Goscinny (à droite), pour la sortie du film
Astérix le Gaulois, en 1967.
FONDS D’ARCHIVES INSTITUT RENÉ GOSCINNY/DR

Sur le papier, le projet prend forme. La complicité des auteurs permet de faire naître un héros « made in France », qui pourra se targuer de rivaliser avec les voisins belges du journal de Tintin et les magazines pulp américains. « Pour écrire son scénario, Goscinny s’est solidement documenté à partir des récits de Jules César sur la guerre des Gaules. Il a construit l’image d’Astérix par l’intermédiaire des peintures romantiques du XIXe siècle et des leçons d’histoire d’alors, qui étaient présentes dans les manuels scolaires », développe Éric Teyssier. Albert Uderzo planche alors sur la morphologie du personnage et l’inspiration lui vient en fumant une cigarette. « Pour créer le fameux casque ailé de son héros, Uderzo s’est fortement inspiré d’un casque celtique du Ve siècle après Jésus-Christ. Jusque-là tout va bien (rires). Mais ce casque est issu de l’illustration centrale des paquets de Gauloises, qui elle-même sort de l’imaginaire collectif sur la période », raconte l’universitaire. 29 octobre 1959, Astérix est né.

Bien loin des longs et ennuyeux péplums hollywoodiens, les aventures d’Astérix sont riches et colorées 

Le premier numéro d’Astérix dans Pilote le met en scène aux côtés d’Obélix, en train de tenir tête à une patrouille de légionnaires. Ces quelques cases constituent les premières pages d’Astérix le Gaulois, publié en version intégrale en 1961. Sa débrouillardise et son ingéniosité lui permettent de vivre d’incroyables épopées. « Les Français sont attachés à Astérix. C’est un héros important de notre culture populaire. Son côté « gaulois réfractaire » plaît aux gens car il est la représentation d’un esprit à la Française », explique Éric Teyssier. Humour potache, esprit de franche camaraderie, personnages zélés, il construit son odyssée de tome en tome. L’ambiance installée dans chaque scénario invite au voyage et à l’évasion.

Bagarre au village des irréductibles avec les légions romaines Ⓒ 2015 Editions Albert René
Bagarre au village des irréductibles avec les légions romaines Ⓒ 2015 Editions Albert René

Des Goths aux gladiateurs, en passant par les Helvètes et les Vikings, chacune de ses aventures lui fait rencontrer de nouveaux peuples, avec leurs us et coutumes. Sans oublier les véritables personnalités historiques qu’il côtoie comme la reine égyptienne Cléopâtre, le chef celte Cassivellaunos où le général romain, Scipion l’Africain. Mais, il se heurte surtout au machiavélique Jules César qui met tout en œuvre pour faire main basse sur le village d’irréductibles. Le volume 10, Astérix légionnaire est le plus abouti de la série. Les running gags comiques et les péripéties burlesques font de ce livre une référence dans l’univers de la bande dessinée. Goscinny renoue avec l’espièglerie intellectuelle du personnage. L’humour rétro fonctionne toujours aussi bien et cette immersion dans la Légion romaine exploite une autre facette de l’occupant. « Astérix est un super-héros français ! Il s’inscrit dans la culture moderne et tient la comparaison aux personnages de comics américains comme Superman ou Spider-Man. Son auto-dérision et son humour expliquent la longévité de l’œuvre et son succès », justifie Éric Teyssier.

Icône culturelle

En 1999, près de quarante ans après sa création, Astérix le Gaulois figure dans le classement des cent meilleurs livres du XXe siècle. « L’œuvre de Goscinny est une inusable référence littéraire. À travers les forces et les faiblesses de ses écrits, le personnage d’Astérix s’est démarqué de l’image dépeinte du gaulois par Jules Michelet au XIXe siècle », raconte Jean-Yves Boriaud, professeur de littérature latine à l’université de Nantes. Le personnage est devenu une véritable icône culturelle. Jean-Yves Boriaud poursuit, « c’est un concentré de données logistiques et idéologiques. Astérix est une idée française. Il est indissociable de la politique et s’adapte à toutes les époques. Il est la synthèse de l’ensemble des productions artistiques faite depuis Lionel Royer (Vercingétorix jette ses armes aux pieds de César) au XIXe siècle, jusqu’à nos jours avec Silvio Luccisano (Le casque d’Agris) », développe-t-il. En 2017, une couverture originale de l’album Le Tour de Gaule a atteint le prix record de vente à 1,4 millions d’euros.

Le septième art s’est vite intéressé au personnage. 14 films au compteur et les plus grands réalisateurs pour lui donner vie, de Claude Zidi à Alexandre Astier, en passant par Alain Chabat. Le jeu vidéo s’est invité à la partie. 40 aventures vidéoludiques ont eu lieu depuis 1983. « Il est l’incarnation de notre pays, dans ses bons comme dans ses mauvais côtés. Avec Astérix, c’est l’image de toute une culture, qui évolue avec son temps et avec ses artistes », explique Jean-Yves Boriaud. 60 ans de règne sur la bande-dessinée et 30 ans de domination sur les parcs à thème. En 2019, le Parc Astérix a battu un nouveau record de fréquentation avec 2,3 millions de visiteurs.

Astérix, une oeuvre intergénérationnelle

L’œuvre de Réné Goscinny et Albert Uderzo vit toujours. Leur héritage inspire la nouvelle génération de scénaristes et de dessinateurs. En 2007, un album inédit et entièrement constitué à partir de créations originales rendait hommage à Albert Uderzo, pour ses 80 ans. Le dessinateur Turf (La Nef des fous) y a participé. Il raconte : « L’humour est présent à toutes les pages. C’est ce qui fait le charme de la BD. Rien n’a vieilli. J’ai vraiment eu un coup de cœur pour le travail de Goscinny et Uderzo. Tout est réuni pour une grande aventure qui s’adresse aux petits comme aux grands. Astérix c’est mon enfance. Je suis un grand fan. Il y a de l’amitié et de l’action. Les personnages sont vraiment attachants. Le lecteur se reconnaît en eux. Par rapport à l’Histoire et au monde de la bande dessinée, on peut dire que le gaulois d’hier est le français d’aujourd’hui. »

Au revoir Monsieur…

Publiée par Turf Auteur sur Mardi 24 mars 2020

Auteur à succès de la série Kid Paddle, Midam ne cache pas son admiration pour le travail mené par Uderzo. Il se dit influencé par ce dernier : « Je me sens un de ses héritiers sur le plan du récit classique. Astérix est un travail académique. Pourtant dans les années 90, quand j’ai débuté, un nouveau genre de BD s’est complètement opposée au genre classique, une œuvre dite d’Auteur qui s’éloignait du récit classique, jouait de l’autobiographie et montrait une animosité face à ces BD « de papa ». Il y a encore aujourd’hui pas mal de BD qui se veulent des romans graphiques et des auteurs qui se pincent le nez face aux « héros de verre à moutarde », pour utiliser leur expression. Le classicisme est une valeur sûre, un marqueur intemporel et on y revient toujours, c’est sans doute la plus forte influence d’Astérix sur mon travail. » Fort de ses 60 ans de rasades de potion magique et de ses 370 millions d’albums vendus dans le monde, Astérix demeure un héros intemporel. L’aura du petit gaulois continuera de bercer des générations de lecteurs.

—————————————————————————————————————————–

Pour en savoir plus sur le sujet, la rédaction vous recommande quelques ouvrages …

Astérix et ses amis, ouvrage collectif, ed. Albert René, 64 pages, 10 euros.  

Générations Astérix : L’Album hommage, ouvrage collectif, ed. Albert René, 140 pages,  25 euros.

—————————————————————————————————————————–

▶︎ Cet article a été réalisé en partenariat avec Valeurs Actuelles

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Choix de la rédaction

Pin It on Pinterest