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Sur les traces de nos Poilus : Charles Péguy

Portrait du lieutenant de réserve, Charles Péguy, lors d’une manoeuvre avec le 276e R.I en 1913

Charles Péguy fait partie de cette génération d’artistes bouleversés par la défaite de 1870. Lui, fils de rempailleurs orléanais grandit avec de fortes convictions libertaires. Poète avant-gardiste, sa plume ne cesse de combattre les injustices et notamment celle infligée au capitaine Dreyfus.

Charles Péguy, le premier intellectuel Français tombé dans les combats d’août 1914

Patriote et humaniste, il dénonce dès 1905, avec la crise de Tanger, les maux du nationalisme qui viennent s’immiscer dans  la vie politique du vieux continent. Le spectre de la guerre l’inquiète et il écrit à ce sujet : « En temps de guerre celui qui ne se rend pas est mon homme, quel qu’il soit, d’où qu’il vienne et quel que soit son parti. Il ne se rend point. C’est tout ce qu’on lui demande. Et celui qui se rend est mon ennemi, quel qu’il soit, d’où qu’il vienne, et quel que soit son parti. Et je le hais d’autant plus, et je le méprise d’autant plus, que par le jeu des partis politiques il prétendait s’apparenter à moi. »  

À bientôt quarante ans, l’âge avancé de Charles Péguy aurait pu lui permettre de ne pas participer à la Première Guerre mondiale. Il n’en est rien. Fortement marqué par les préceptes de Bergson, son professeur de philosophie à l’École Normale Supérieure, le poète orléanais refuse de voir des innocents se faire massacrer à sa place. Enrôlé comme lieutenant dans le 276e régiment d’infanterie, il commande la 19e compagnie, entièrement composée de réservistes.

Pour l’honneur du lieutenant Péguy

Mobilisé, le 04 août 1914, le lieutenant Péguy rejoint son unité près de Coulommiers (Seine-et-Marne). Sous les ordres du capitaine Guérin, le 276e d’infanterie doit renforcer les flancs de l’infanterie coloniale partie à l’assaut de la commune de Penchard. Le 04 septembre, le régiment de Péguy stationne à Montmélian. Selon certains témoignages d’époque, l’écrivain se serait recueilli toute la nuit dans la petite chapelle du village.

Le lendemain matin, le lieutenant de réserve excité à l’idée de monter au front, il fait entonner à ses soldats la Marche des grognards, pour leur donner du courage avant l’assaut. Admiratif, de la cohorte militaire qu’il accompagne, il ne s’éloigne pas de l’étendard du régiment et récite sur le parcours vers Villeroy, quelques psaumes qui exaltent sa foi.

Prenant position face aux colines de Monthyon et de Penchard, les fantassins ne s’attendent pas à une si farouche opposition de la part de l’armée allemande. À découvert, les hommes du capitaine Guérin tombent sous les obus ennemis. Dans l’urgence, lui et ses compagnons d’armes se regroupent dans un bosquet jouxtant Villeroy. Le lieutenant Péguy prend alors le commandant du régiment. Sabre au clair, il ordonne une charge à la baïonnette. Aux premières heures de la bataille de la Marne, les restes du 19e bataillon du 276e RI chargent les troupes allemandes qui foncent sur Paris.

Képi de Charles Péguy exposé au Musée 14-18 de Villeroy-Sur-Marne

Dans la lignée des héros français qu’il admire, Charles Péguy offre un glorieux combat sur le plateau de Goële (ndlr : « vingt siècles de peuple et vingt siècles de rois me font cortège. (…) Je suis fier d’appartenir à la piétaille, cette communauté d’histoire et de destin », La Tapisserie de Notre-Dame). Haranguant sa troupe, il vocifère et s’écrie à plusieurs reprises « Le 19 en-avant, suivez-moi. Tirez ! Tirez ! Nom de Dieu ! ». Enivré par la voie martiale tel un croisé, Charles Péguy est touché par une balle en plein front et s’écroule sur le coup.

Ce 5 septembre 1914, la littérature française vient de perdre l’un des plus brillants auteurs de son temps. Proche du lieutenant au moment de sa mort, le soldat Victor Boudon raconte : « Juste avant de mourir, le lieutenant a dit : « Oh mon Dieu, mes enfants » ». Confiant en la vie et sûre de son destin, le lieutenant Péguy repose près de Meaux, à Villeroy-sur-Marne, parmi les 133 soldats tombés à ses côtés le 5 septembre 1914.

M.C. 

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